Très gros plan sur des documents sur un bureau. Une résolution du Conseil cri de Waswanipi concernant les territoires protégés. Des mains tournent les pages, révélant une carte.
Allan Saganash
Alors, quand vous parlez de, euh… Vous l’avez eu? Lorsque vous parlez de, euh, la protéger, la protection, l’importance du territoire et son utilisation, nous devons faire un processus de cartographie où nous identifions les zones que nous utilisons en expliquant leur importance afin que les compagnies, les promoteurs forestiers, puissent savoir que ces zones importantes, elles viennent...
Toujours en gros plan, Allan Saganash déploie une autre carte et cache des éléments de légendes qui sont confidentiels.
Elles viennent avec les noms de famille, OK? C’est confidentiel. C’est pour ça que je les cache. Ça, par exemple, c’est une ligne de trappe. J’utilise la ligne de trappe de ma famille parce que je n’ai pas le droit d’utiliser les autres. J’ai eu le feu vert de mon frère pour l’utiliser pour l’entrevue. Ce que vous voyez ici… Tout est numéroté : où se trouvent les sentiers d’accès, où se trouvent les zones d’orignaux, les tanières d’ours, les zones de pêche. Et elles sont toutes numérotées. La légende ici montre ce qu’elles sont. Par exemple, le numéro un, c’est un campement permanent, OK?
Gros plan sur la légende. Une grille détaille les éléments numérotés.
Et ça décrit chaque zone.
Fondu au noir. Scène suivante. Gros plan sur les mains d’Allan Saganash montrant des éléments sur la carte. Des icônes de tentes, d’orignaux, d’ours et de sentiers de motoneige sont visibles.
Ce sont des camps cris. Voyez-vous les camps cris ici? Les lieux de sépulture, d’accord? Et tous les noms ici. C’est très, très, euh… C’est beaucoup d’informations condensées, mais les compagnies ne voient jamais cela. Elles ne voient jamais ce que c’est à cause de la confidentialité. Beaucoup de gens disent : « Je vais le faire. Je vais vous montrer où sont mes bonnes frayères, ou les zones d’orignaux, ou les tanières d’ours. » Mais vous ne voulez pas que tout le monde le sache, vous savez? Nous avons donc dû développer une autre carte appelée Carte d’aide à la planification forestière. OK?
Allan Saganash déploie une autre carte. La caméra continue de montrer un gros plan du bureau où les cartes sont empilées. La nouvelle carte montre également les sentiers de motoneige, mais aucune icône n’est affichée.
Cette carte d’aide à la planification forestière vous donne une idée de ce que c’est, mais ce sont des points distincts. Ils sont comme, euh, globaux.
Ils sont globaux. Par exemple, ces régions ici, on ne vous dit pas ce que c’est. On ne voit pas les tanières d’ours. On ne voit pas les zones d’orignaux. Elles sont globales. Comme ça, on ne sait pas ce que c’est. Si vous regardez cette carte, vous saurez ce que c’est par la légende. OK? Elles sont globales. C’est ce que, euh, ce que, euh, les compagnies utilisent, euh, mais seulement à la condition qu’elles ne donnent pas cette information à qui que ce soit d’autre. Alors, nous devons signer une entente. Vous l’utilisez seulement pour votre planification forestière. Vous ne pouvez pas la transmettre à un tiers. Et ils la conservent. Chaque entreprise possède donc cette carte.
La caméra se déplace vers la droite pour montrer un gros plan des clauses de confidentialité signées à droite de la carte, sous la légende.
Intervieweur
Est-ce qu’ils le respectent?
Allan Saganash
Quoi?
Intervieweur
Est-ce qu’ils le respectent?
Allan Saganash
Non. Et j’en arrivais là. Ils ne l’utilisent pas parce qu’ils ne le comprennent pas.
La caméra reste en gros plan, affichant les logos dans le coin inférieur droit de la carte. Elle revient aux mains d’Allan Saganash, au centre de la carte, où il y a une grille.
Ce qui est si difficile à faire comprendre, c’est qu’il s’agit d’une zone très importante. Et vous revenez et faites votre planification forestière en disant : « C’est important, alors je vais avoir une méthode différente de planification ici. C’est une zone sensible. Je vais faire de la coupe en mosaïque où je peux laisser un peu, euh, de la forêt résiduelle, les choses comme ça. » Mais ils ne le font pas. Beaucoup d’entre eux ne le font pas. Certains le font. C’est, euh… Ça a coûté beaucoup d’argent pour faire ce recensement parce que cela représente 62 lignes de trappe. Et j’ai dû engager des gens pour déterminer l’importance de ces lignes de trappe. L’utilisation du territoire, et tout cela, est consignée ici.
Très gros plan sur le visage d’Allan Saganash.
Et, malgré tout, ils ont ça. Ils savent où sont toutes les zones. Nous utilisons cette carte pour notre argumentaire, pour étendre les zones tampons sur les plans d’eau. On leur dit : « Les plans d’eau sont la partie la plus importante des lignes de trappe pour les Cris parce que c’est là qu’ils vivent. C’est là qu’ils chassent, pêchent et trappent. »
Zoom arrière et retour sur un gros plan de la carte.
Et, pourtant, ils ne semblent pas comprendre ça. Leurs activités sont la pêche dans l’eau. Oui, mais pour un Cri, ça va beaucoup plus loin que ça.
La caméra quitte le gros plan sur Allan Saganash. Il porte une chemise rouge. Derrière lui se trouve une étagère remplie de classeurs numérotés.
Comme je l’ai dit, dans le passé, dans la génération de mon père et de son grand-père, il y a eu très peu de développement pour le territoire. Et, pourtant, ils parlaient tout de même de protéger cette région. Mon grand-père était chef à l’époque. Il y a 75 ans, il parlait déjà de l’importance du territoire et de ce qui devrait être fait.